Il enchaîna les grandes boucles que dessinait la piste à travers la haute forêt de trembles, puis traversa la vaste prairie jusqu’à la lisière des pins, au point de départ du sentier de Cold Creek, et gara le vieux pick-up Chevrolet bleu de son père à côté de la pancarte déglinguée, dans la douce lumière crépusculaire de septembre.
A Cold Creek, Mack, tout juste sorti de prison, attend Vonnie, son ex-femme, qui a accepté de le rejoindre pour une dernière de leurs traditionnelles randonnées dans les montagnes du Wyoming. Quelques jours de marche à deux pour un bilan au grand air, pour se dire au revoir, sans illusion. Rien de plus. Sauf que, sans le dire à son ex, Mack à accepter un dernier contrat douteux, celui de profiter de la balade pour tenter de retrouver dans les bois une balise tombée d’un avion fantôme.
Le Signal est composé de six chapitres : les six jours de randonnée en montagne de Mack et Vonnie. Au rythme de leurs pas, on découvre les étendues sauvages, les lacs, les sillons herbeux, les cerfs et les ours bruns ; autour d’un feu de camp, on épie la complicité retrouvée du couple, on surprend leurs confidences échangées, les flashbacks sur le passé, heureux et malheureux… L’atmosphère est douce et triste, légère tout de même, parfois plus électrique quand un échange vire à l’acerbe.
Ron Carlson décrit ses personnages et leur évolution avec simplicité et clarté, à l’image des paysages dans lesquels il les fait évoluer. Vonnie, au fond, est restée l’adolescente tombée amoureuse des montagnes et des ours bruns, et accessoirement de Mack aussi, l’année de ses 17 ans. Malgré les difficultés rencontrées, elle a gardé une certaine candeur et sa capacité à apprécier les petites choses d’une vie simple. Mack a tout du bon gars sur lequel le sort s’acharne avec constance. Il est courageux et volontaire, mais fragile aussi : il doute en permanence, surtout de lui-même. Pour sauver son ranch de la faillite, il a emprunté des chemins de traverses, quitte à s’y perdre et à perdre Vonnie : magouilles, trafics divers, alcool…
Alternant les descriptions poétiques et les moments plus prosaïques, l’écriture épouse le rythme de ce voyage et des changements climatiques, tantôt paisible comme la nature environnante, tantôt saccadée quand un coup de feu éclate dans la nuit ! Ainsi, tout en explorant avec finesse les lendemains de l’amour fou, cette histoire se transforme peu à peu en un thriller inquiétant… Ron Carlson réunit dans son roman trois histoires en une : un beau roman contemplatif sur la nature à l’état sauvage, une histoire d’amour partie à la dérive à cause des difficultés du quotidien et un suspense angoissant.
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⭐⭐ Le Signal (The Signal), Ron Carlson, traduit de l’américain par Sophie Aslanides, éd. Gallmeister, coll. Nature Writing, 2014 (2013), 222 pages, 22 €.
Ça à l’air pas mal.
Le Papou
C’est pas mal du tout, vraiment !
Tentant… j’aime beaucoup cette maison d’édition…
Moi aussi ! Je suis toujours leurs publications avec attention.
le thriller ce n’est pas ma tasse de thé mais le reste si et plus encore? du coup je crois que ça se tente 🙂
La partie « thriller » n’est pas l’essentiel de ce roman, je pense qu’il pourrait te plaire ! 😉
Fan de Gallmeister, j’avais repéré ce livre – ton avis me donne encore plus envie de le lire car il regroupe tout ce que j’aime dans la littérature
J’aime beaucoup le nature writing, surtout quand il se teinte de thriller ! Du coup, forcément, j’aime Gallmeister ! 😉
Un roman que j’avais beaucoup aimé !
Je l’ai tellement aimé que je viens d’emprunter un autre roman de Ron Carlson à la médiathèque : « Cinq ciels ».
Encore un gallmeister qui me tente beaucoup 🙂
Gallmeister, c’est le bien ! 😉