[roman] (Les Rougon-Macquart, tome 1) « La Fortune des Rougon » Émile Zola

La Fortune des Rougon est le premier roman de la série des Rougon-Macquart, ensemble de 20 romans écrits par Émile Zola entre 1871 et 1893. Sa saga est sous-titrée Histoire naturelle et sociale d’une famille sous le Second Empire, rappelant ainsi l’ambition de Zola d’y peindre à la fois le portrait d’une époque (le Second Empire et les grandes transformations sociales, politiques, techniques… qu’il voit émerger) et celui d’une famille et de ses « tares » héréditaires qui se transmettront sur cinq générations, depuis l’ancêtre, Adélaïde Fouque, née en 1768), jusqu’à son descendant à naître en 1874.

La Fortune des Rougon est donc, clairement, en tant que premier roman de la série, un roman « d’exposition ». Il installe les personnages, l’époque (le Second Empire) et le lieu (Plassans, petite bourgade du Midi de la France). On y trouve le haut de l’arbre généalogique des Rougon-Macquart avec Adélaïde Fouque (ou « Tante Dide »), l’ancêtre de la famille. Adélaïde épousera un jardinier du nom de Rougon dont elle aura un fils, Pierre. Veuve, elle vivra hors mariage avec Macquart, un contrebandier alcoolique qui lui donnera une fille, Ursule, et un garçon, Antoine. Elle sombrera peu à peu dans la folie. Ses enfants donneront naissance aux trois branches de la famille : les Rougon, ambitieux et cupides ; les Mouret (branche de la famille née du mariage d’Ursule avec un chapelier) chez qui la fragilité mentale de l’aïeule réapparaît souvent ; et les Macquart qui héritent de la paresse, de l’ivrognerie et de la violence de l’aïeul.

Côté descendance, nous avons donc tout d’abord Pierre Rougon. Cupide, ambitieux et opportuniste, il souhaite par-dessus tout s’extraire de sa condition et devenir « bourgeois ». Pour cela, il est prêt à toutes les bassesses et trahisons : il s’accapare l’héritage de sa mère en spoliant et expulsant son demi-frère Antoine sa demi-sœur Ursule. Il se marie avec la fille d’un marchand d’huile, Félicité (tout aussi avide et ambitieuse que son mari, mais sans doute plus intelligente que lui et fine manipulatrice), et reprend le commerce familial. Ils ont ensemble cinq enfants : Eugène, Pascal, Aristide, Sidonie et Marthe. Après des études de droit leur fils aîné, Eugène, acquiert un haut poste à Paris, ce qui lui permet de prévoir le coup d’État du 2 décembre 1851 : il en prévient ses parents et les guide afin qu’ils profitent de la situation pour faire fortune et établir leur position à Plassans. Aristide quant à lui est un arriviste sans principe : il pense tout d’abord que c’est la République qui va l’emporter et la soutient donc ardemment. Lorsqu’il découvre que son frère Eugène soutient Louis-Napoléon Bonaparte, il se met à douter de la victoire républicaine et change de camp pour le bonapartisme. Le « Docteur Pascal » est le seul membre sympathique de la fratrie : il ne s’intéresse ni à la politique, ni à l’argent, il est généreux (il soigne les pauvre gratuitement et aidera les républicains en les soignant), mais peut aussi paraître froid car pour lui la recherche et la science priment sur les sentiments.

Antoine Macquart devient soldat. Quand il revient à Plassans, il découvre que son demi-frère lui a volé sa part d’héritage mais ne peut obtenir réparation. Il épouse « Fine » dont il a trois enfants : Lisa, Gervaise et Jean. Paresseux, colérique, ivrogne et violent, il se fait entretenir par sa femme et ses enfants, mais sera finalement abandonné par ses derniers à la mort de leur mère. Il est un républicain engagé, non par conviction mais par opposition à son demi-frère Pierre.

Ursule se marie avec Mouret, un chapelier, ce qui lui permet de fuir la maison où son demi-frère Pierre lui rend la vie impossible. Ils ont trois enfants : François, Hélène et Silvère. A la mort de ses parents Silvère, encore enfant, est recueilli par Adélaïde.

L’intrigue prend donc place à Plassans, peu après le coup d’Etat du 2 décembre 1851 (par lequel Louis-Napoléon Bonaparte, président de la République française depuis trois ans, conserve le pouvoir à quelques mois de la fin de son mandat). Deux camps s’affrontent alors : celui des bourgeois conservateurs et celui du peuple républicain. Pierre Rougon va profiter des événements pour faire fortune et s’octroyer le pouvoir politique à Plassans. En parallèle, on suit aussi l’histoire de Silvère Mouret (fils d’Ursule) et de son amoureuse Miette. Les deux jeunes gens, naïfs et idéalistes, s’engageront auprès des insurgés républicains et participeront aux émeutes. Miette sera tuée pendant la bataille et Silvère sera abattu par un gendarme après la défaite. Après avoir assisté à cette scène, la grand-mère Adélaïde sombrera définitivement dans la folie.

Au roman historique et critique (de la conquête du pouvoir par Louis-Napoléon Bonaparte), Zola entrelace un roman des mœurs provinciales et un roman d’amour. Il dépeint de manière très tendre l’idylle entre Silvère et Miette, leur amour ingénu, leur générosité, leur inconscience naïve… Cette joliesse vient contrebalancer la noirceur des autres personnages, quasiment tous manipulateurs, ignobles et grotesques. Les personnages sont, tous, excessifs voire caricaturaux. Le tout manque parfois de subtilité, mais sert le propos de Zola, déterministe, qui par sa saga veut étudier l’influence du milieu sur l’Homme et les tares héréditaires d’une famille.

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⭐ Émile Zola, La Fortune des Rougon, éditions folio classique, 2000 (1871), 460 pages.

12 commentaires sur “[roman] (Les Rougon-Macquart, tome 1) « La Fortune des Rougon » Émile Zola

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  1. Je ne l’ai jamais lu, celui-là (comme plein d’autres d’ailleurs, j’essaie peu à peu de -re-découvrir la série des Rougon-Macquart). Mon prochain sera La terre, dans le cadre d’une LC pour mi-avril (si cela t’intéresse), mais je note ce titre, c’est le 1er tout de même..

    1. C’est mon défi littéraire personnel pour 2019 : lire la série des Rougon-Macquart dans l’ordre ! Je suis actuellement plongée dans le second, « La Curée », et bien loin encore de « La Terre »…

    1. Oui, c’est mon défi littéraire perso pour 2019 : lire la série des Rougon-Macquart dans l’ordre ! Là je suis plongée dans « La Curée ».

  2. J’avais eu le projet de relire ces RM dans l’ordre, mais le côté un poil trop démonstratif m’a fait arrêter en plein ce premier volume. Bah ,au moins je les ai tous lus, c’est quand même à voir. Courage pour la suite!

    1. Ah oui, celui-ci est très démonstratif en effet. Mais je me dis que c’est le premier, un roman « d’exposition », j’espère que les autres seront plus « fluides » !

  3. Tu parles de la noirceur de certains personnages, ça va pas en s’améliorant. Déjà dans La Curée, c’est pas mal.
    Et ce roman est complètement différent des autres dans le sens où les autres tomes que j’ai lu, focalise sur une période plus courte et moins de personnages de la famille.

    1. On sent bien que ce premier roman est un roman d’exposition, qui présente toute la lignée, et que tous sont assez ignobles en effet !

  4. J’ai commencé la série par le premier… et après avoir tout terminé, j’ai bien envie de relire ce premier tome. J’ai beaucoup aimé.

  5. Celui-là, je l’ai lu mais j’ai bien envie de lire les autres tomes (il me reste la moitié du cycle à lire !). Moi, j’adore son manque de subtilité : tout est toujours épique chez Zola…

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