[mini-chronique : nouvelles] « Les 10 amours de Nishino » Kawakami Hiromi

Elles sont dix, dix femmes à avoir aimé Nishino, pour une heure ou une vie. A tour de rôle, elles racontent leur rencontre et elles racontent Nishino, cet homme séduisant et sauvage qui donna à chacune le sentiment d’exister. Se dessine en creux le portrait morcelé d’un homme magnétique, peut-être plus fragile qu’il n’y paraît, mais qui reste insaisissable : lui, qui a-t-il aimé ? Ces dix récits, elliptiques, composent ainsi dix variations sur l’amour et ses mystères… Des récits d’une douceur enveloppante qui nous invitent à saisir tous les petits plaisirs simples et fugaces de la vie : la flaveur d’un thé, le bruissement d’une étoffe, un regard qui s’attarde, un baiser échangé… Ces mille petits riens qui rendent la vie plus belle.

Un homme capable de répondre au désir d’une femme dont elle-même n’est pas consciente mais que lui est capable d’aller puiser dans les profondeurs de son cœur… Voilà comment était Nishino. Toutes choses sans importance. M’appeler quand je le souhaitais. Me téléphoner à la fréquence qui me convenait. Me consoler par ses intonations. Se montrer câlin comme j’en avais envie. Me gronder comme je le désirais. Autant de choses simples, qu’aucun homme n’est en mesure d’accomplir avec finesse. Mais pour Nishino, c’était un jeu d’enfant. Il était haïssable , tant pour les hommes que pour les femmes. […]
Les filles devenaient peu à peu exigeantes, critiquant ses défauts. Tu ne m’aimes pas assez, tu es toujours ailleurs, tu n’as pas de cœur, autant de critiques dont elles l’accablaient invariablement . J’incline à penser qu’elles haïssaient la perfection de Nishino, dans un coin de leur cœur. Cette perfection fuyante, insaisissable qui n’appartenait qu’à lui. (p. 186-187)

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⭐ Hiromi Kawakami, Les 10 amours de Nishino (Nishino Yukihiko no koi to bôken), traduit du japonais par ElisabethSuetsugu, éditions Picquier poche, 2015 (2003), 251 pages, 7,50 €.