[roman] « Le nom de la rose » Umberto Eco

Au commencement était le Verbe et le Verbe était auprès de Dieu, et le Verbe était Dieu. (p. 13)

An de grâce 1327 : la chrétienté est en crise, divisée entre l’autorité du pape avignonnais Jean XXII et l’empereur d’Allemagne, Louis de Bavière, qui cherche à étendre son règne. Guillaume de Baskerville, moine franciscain, ex-inquisiteur et représentant du Saint-Empire doit organiser une rencontre pour réconcilier les instances religieuses qui soutiennent l’un ou l’autre des partis. Cette rencontre doit se dérouler dans une abbaye bénédictine isolée sur les contreforts d’une montagne, havre de sérénité et de neutralité, célèbre pour la science de ses moines et la richesse de sa bibliothèque où s’amasse, en milliers de volumes et de manuscrits, la somme du savoir humain. Mais dès son arrivée, accompagné de son secrétaire le jeune novice Adso de Melk, Guillaume de Baskerville se voit prier par l’Abbé d’enquêter sur la mort d’un moine, retrouvé écrasé aux pieds des murailles. C’est la première des sept morts suspectes qui vont égrener les sept journées et les sept chapitres de ce récit, la clef de ces morts inexplicables semblant devoir être cherchée du côté de la mystérieuse et labyrinthique bibliothèque…

En apparence, Le nom de la rose est donc une chronique médiévale articulée sur une intrigue policière. En effet, Umberto Eco livre ici un prodigieux document sur l’histoire du début du XIVe siècle, ses conflits et enjeux intellectuels, religieux et politiques. De plus il parsème son récit de ses propres réflexions sur l’époque médiévale, le rôle de l’Église, l’objectivité scientifique contre la subjectivité de la foi religieuse, l’art, la sémiologie… Il livre aussi un vrai et grand polar habilement mené, avec suspens savamment dosé, crimes en série, criminel hors pair qui ne se découvre qu’à l’ultime rebondissement d’une enquête haletante qui mêle réflexion, malice et cruauté. Enfin, il multiplie les références à la littérature, la plus transparente étant l’hommage rendu à Conan Doyle et son héros Sherlock Holmes dont Guillaume de Baskerville est le double. Le roman d’Umberto Eco est en lui-même une bibliothèque, où l’on se régale de reconnaître ici un passage de Zadig de Voltaire, de croiser là une évocation de Notre-Dame de Paris de Victor Hugo, et sans doute bien d’autres références encore, que je n’ai pas su relever ! Énigmes dans l’énigme, ces références sont si adroitement glissées qu’elles ne nuisent jamais à l’agilité de l’intrigue.

Le nom de la rose, sous sa forme amusante de roman policier et savante de devinette érudite, est au final un formidable plaidoyer contre l’obscurantisme, et pour la diffusion des savoirs et la liberté. Le tout porté par une érudition à aucun moment prétentieuse mais au contraire qui coule en phrases claires et précises, dans une écriture limpide.

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❤ Umberto Eco, Le nom de la rose (Il nome della rosa), traduit de l’italien par Jean-Noël Schifano, éditions Le livre de poche, 1982 (1980), 542 pages, 6,50 €.

Du même auteur : Le Cimetière de Prague & Numéro zéro.

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9 commentaires sur “[roman] « Le nom de la rose » Umberto Eco

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  1. Lu il y a bien longtemps et j’avais adoré☺ j’avais trouvé le film a là hauteur !

  2. Dans ma bibliothèque depuis quelque temps (quelques années ?). Cet article me donnes envie de le dépoussiérer pour enfin me plonger dedans !

  3. J’ai vu le film .. mais ça doit bien faire 20 ans ! Je suis tentée de lire ce roman et aussi de découvrir l’auteur : Eco. Il y a d’autres titres que tu me recommande ?

    1. « Le nom de la Rose » reste mon Umberto Eco préféré (et sans doute le plus accessible), mais j’ai aussi bien aimé « Le cimetière de Prague ».

      1. Merci pour le renseignement, c’est vrai que j’ai fais un tour de ses autres titres et les sujets me plaisaient beaucoup moins.

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