1979, une ville portuaire russe, à la veille des jeux Olympiques. Rosa, 17 ans et un brin naïve, obtient un emploi de secrétaire au Centre d’assainissement du port, bureau SSE-2, en charge de l’inspection sanitaire des cargos. Elle y rencontre Éléna, sa chef revêche, la sirupeuse Katia aux airs de sorcière et le spécialiste Vassili, dont la verve mi-enjôleuse mi-moqueuse pourrait bien finir par la séduire. Son travail s’avère d’un ennui total : elle ne comprend pas très bien ce qu’elle fait là et encore moins la mission de son service et passe le temps en compagnie d’Angélique marquise des anges. Et puis, peu à peu, Rosa découvre que, sous couvert de paperasseries administratives, son service cache une mission aussi secrète qu’inquiétante : le SSE-2 est en réalité chargé d’empêcher les « parasites de nature non biologique » (démons, succubes et autres dibbouks) d’envahir la patrie du socialisme ! Quand des cadavres atrocement mutilés sont découverts dans la ville, le doute n’est plus permis : un parasite a réussi a échapper à leur vigilance ! La traque (et les ennuis) commence : il leur faut régler le problème avant que les autorités ne les désignent comme boucs émissaires. Mais tous leurs efforts semblent s’engluer dans une atmosphère fantasmagorique étrange et poisseuse…
Le fantastique s’insinue peu à peu dans le récit, tant par l’irruption du « parasite » que par la satire d’un état en déliquescence : les soirées passées à guetter une chose inconnue, sur laquelle ils n’ont aucune prise, renvoient les personnages à la précarité de leur statut dans une société gangrenée. Et l’écriture de Maria Galina, faite d’ellipses et de suggestions, maintient l’incertitude : sommes-nous dans un univers surnaturel ou est-ce la médiocrité, l’absurdité et la corruption de l’URSS (tels qu’ils nous sont présentés) qui rendent chaque protagoniste suspect, chaque événement « factice » ? Au cours du récit, le ton se fait doux-amer : les personnages, tous en décalage avec une société qui les flouent cruellement, peinent à habiter leurs vies. Ils rêvent tous « d’autre chose », d’un « ailleurs », mais restent captifs d’une société sclérosée.
L’organisation est un roman déroutant, un peu trop « relâché » pour être totalement convaincant : son sens se dérobe bien souvent.
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⭐ Maria Galina, L’organisation (SES-2), traduit du russe par Raphaëlle Pache, Agullo Éditions, 2017 (2009), 366 pages, 22 €.
J’avais bien aimé ce roman, notamment pour son ton, et l’aspect en effet foutraque de l’intrigue ne m’avait pas trop gênée.
J’ai bien aimé, mais j’ai préféré « Autochtones » !
Une maison d’édition que j’aime beaucoup, sauf pour la littérature fantastique que je ne goûte pas.
Une maison d’édition que je découvre, je ne la connaissais pas.